Qu’arrive-t-il quand le cinéma baroque et flamboyant de Pedro Almodóvar rencontre l’univers du design français signé Roche Bobois ? Une explosion de couleurs, de formes et d’émotions, réunies dans une collection qui a déjà des allures d’instant culte. Cromatica, dévoilée à la dernière Milan Design Week en avril et lancée en septembre, n’est pas simplement une ligne de mobilier: c’est une déclaration de style. Un manifeste joyeux et ensoleillé qui brouille les frontières entre décor de cinéma et art de vivre.

Comme dans tout bon scénario, il y a des personnages-clés. J’ai rencontré l’un d’eux : Grégory Dias Monreal, Directeur des Tendances chez Roche Bobois – une voix passionnée qui m’a raconté cette aventure inédite. Ensemble, nous avons voyagé virtuellement de Paris à Madrid, en passant par les ateliers de création, les coulisses d’un film, pour découvrir comment un canapé ou une coiffeuse peuvent devenir de véritables vedettes.

J’ai découvert Roche Bobois à Paris il y a une trentaine d’années et j’ai vite compris que c’était cette marque de luxe qui n’a pas peur de prendre des risques, de provoquer des rencontres improbables et d’ajouter une touche d’imprévu à son célèbre Art de Vivre à la française. C’est sans doute là le secret de sa longévité : Roche Bobois, qui célèbre cette année dix ans de présence en Roumanie, reste une référence internationale du bon goût justement parce qu’elle sait se réinventer sans jamais perdre son élégance ni sa pertinence.

Aimée des artistes et des créateurs, Roche Bobois est davantage un éditeur de mobilier plutôt qu’un fabricant. Fondée en 1961 comme un partenariat entre deux concurrents apparemment très différents – les frères Patrick & Jean-Claude Chouchan, immigrés juifs originaires de l’Europe de l’Est, et les frères François & Philippe Roche, issus du sud-ouest de la France – la marque ne visait pas le luxe à ses débuts. Elle misait sur la créativité et l’idée de proposer des produits accessibles et durables. Mais c’est justement ce focus sur l’originalité, le design et la qualité produite par la maison-même qui a fait, au fil du temps, place au luxe, comme une conséquence naturelle et la véritable signature de Roche Bobois.

Alors, installez-vous confortablement : nous revenons à Almodóvar et à la scène où le design vole le rôle principal.

Lounge El Deseo, Photos Flavien Carlod, Baptiste Le Quiniou. Textile softwall by molo. Architects : Aires Mateus

 

Phot @Stevens Fremont

 

Qu’est-ce que cet échange vous a apporté sur le plan personnel ou créatif ? Y a-t-il quelque chose que vous avez “emporté” avec vous après avoir travaillé avec un univers aussi cinématographique ?

Cette rencontre avec le maitre du cinéma Espagnol a été plus qu’inspirante car il faut savoir que Pedro Almodovar est un coloriste hors pair, il utilise la couleur comme un véritable langage et un demi-ton ou une demi-teinte sont extrêmement importants pour lui. J’ai beaucoup appris à ses cotés, sur sa vision des contrastes coloriels, son affection pour l’univers Pop Art et son audace à mélanger des couleurs pour créer sa signature visuelle décorative.

 

En complément, vous avez lancé pendant la Milan Design Week 2025 une collection capsule crée en collaboration avec Rossy de Palma, muse flamboyante du réalisateur espagnol. Comment est née cette rencontre, et de quelles pièces est composée la collection ?

Cette collection capsule rend hommage à Rossy de Palma, actrice de renom et muse incontestable de Pedro Almodóvar depuis La Loi du Désir en 1987, où leur collaboration a débuté. Elle a joué dans huit de ses films et apparaîtra également dans le prochain. Artiste aux multiples facettes, ancienne chanteuse de punk rock, artiste visuelle exposant dans des galeries parisiennes, actrice, mannequin, muse des créateurs Jean Paul Gaultier et Azzedine Alaïa, égérie de Saint Laurent depuis deux ans, Rossy de Palma a également présidé le Festival de Cannes en 2022 et détient le titre de Commandeur des Arts et des Lettres, décerné par le ministère de la Culture français.

Rossy a conçu une coiffeuse qu’elle surnomme affectueusement « L’Œil ». Elle déplore la disparition de ce type de mobilier dans les catalogues actuels, le considérant comme essentiel pour les femmes modernes et libres.

Cette collection capsule reflète à la perfection l’audace et la singularité de Rossy. La pièce maîtresse, « L’Œil », incarne une élégance intemporelle. En laque noire brillante, cette coiffeuse est dotée d’un miroir en forme d’œil, une invitation symbolique à l’introspection et à la réinvention de soi, avec une portée presque thérapeutique. Elle incite à faire une pause, à prendre soin de soi, à se regarder vraiment, une véritable célébration de la féminité.
Rossy a également imaginé des lampes sculpturales inspirées des peignes traditionnels espagnols (Peinetas), accessoires emblématiques du style espagnol classique. Ces créations lumineuses symbolisent la grâce féminine et l’audace, tout en apportant une touche artistique aux espaces qu’elles éclairent. Pour compléter cet univers, Rossy a dessiné des tapis en forme d’éventail (Abanico), symbole intemporel de la culture et de l’élégance espagnoles.

Photos @Stevens Fremont

On imagine que travailler avec Pedro Almodóvar et Rossy de Palma, c’est entrer dans une scène de film – intense, colorée, profondément humaine. Comment c’est passé le processus créatif et quel a été le moment le plus marquant ou le plus inattendu durant ces échanges ?

C’est effectivement comme s’introduire dans un film d’Almodovar. Le moment le plus marquant, et qui restera gravé dans ma mémoire, est le premier rendez-vous chez lui, une après-midi à Madrid.

Tout chez lui évoque sa filmographie, et on est immédiatement plongé dans une scène de film où les objets, meubles ou luminaires, résonnent en nous et nous projettent dans Talons aiguilles ou Douleur et gloire. La maitrise des couleurs est magistrale et unique. Un véritable cabinet de curiosités très coloré ou l’accumulation rythme le regard et insuffle une énergie positive et lumineuse en permanence. On en ressort joyeux et avec un sentiment de liberté !!

Avec Rossy de Palma, les échanges sont exubérants et riches en vitalité, elle est de ces rares personnes à vous offrir son authenticité sans filtre, c’est une artiste plurielle, profondément humaine, qui insuffle la vie autour d’elle en permanence. Sa créativité est à son image, audacieuse, élégante et accompagnée d’un message de poésie naturelle positive ».

Pensez-vous que la rencontre avec l’univers d’Almodóvar ouvre une nouvelle voie dans la manière dont Roche Bobois envisage ses partenariats artistiques ? Peut-on s’attendre à d’autres croisements entre cinéma et design ?

Cela fait déjà plusieurs fois que Roche Bobois va puiser ses inspirations de nouvelles collaborations dans des univers artistiques parallèles, c’est cela le French Art de Vivre ! Avec l’Artiste Joana Vasconcelos il y a quelques années, et la collection BOMBOM, nous avions déjà essayer de croiser des univers artistiques pour établir des dialogues et raconter des histoires où la couleur est souvent le fil conducteur et au-delà ce qui nous intéresse c’est d’avoir une vision du Design et de l’habitat à travers d’autres regards.

Photos: ©Roche Bobois, Stevens Fremont, Nico Bustos, Bezire Photography, Flavien Carlod, Baptiste Le Quiniou

Photo @Nico Bustos

 

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